Le 6 juillet 2025, Madrid, capitale de l’Espagne, a accueilli la troisième édition du Sommet hispano-africain, qui s’est déroulé jusqu’au 8 juillet sous le thème : « L’Espagne et l’Afrique : un partenariat mondial, durable et inclusif ». L’événement a rassemblé de nombreuses personnalités, dont Wamkele Mene, secrétaire général de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), ainsi que des représentants de gouvernements tels que la Côte d’Ivoire, le Togo et la Somalie, en présence de hauts responsables espagnols.
Organisé par One Africa Forums, en collaboration avec le ministère espagnol des Affaires étrangères, de l’Union européenne et de la Coopération, ce sommet visait à renforcer le partenariat stratégique entre l’Espagne et l’Afrique, dans une approche fondée sur l’équilibre, la durabilité et les intérêts partagés. L’événement a réuni environ 200 décideurs de haut niveau, dont plus de 30 ministres africains en charge des Affaires étrangères, de l’Économie, des Finances, de l’Industrie et du Commerce, aux côtés de représentants d’organisations régionales, d’entreprises majeures et d’institutions internationales.
Ce sommet s’est articulé autour de cinq axes fondamentaux, qui forment le socle de la stratégie « Espagne-Afrique 2025-2028 » : la coopération économique, la stimulation des investissements, la collaboration sécuritaire, l’intégration régionale et la transition durable. Il intervient dans un contexte de dynamisation des échanges économiques entre les deux parties, avec des exportations africaines vers l’Espagne atteignant 35,7 milliards de dollars en 2024, contre 20,7 milliards de dollars d’importations de produits espagnols.
Ce sommet suscite de nombreuses interrogations quant à la nature réelle des relations entre l’Espagne et le continent africain, ainsi que sur la capacité de l’initiative « Espagne-Afrique 2025-2028 » à se traduire concrètement dans les domaines de l’investissement, de la coopération économique et de l’intégration régionale.
Cela suppose de pouvoir dépasser les écueils liés à la lourdeur bureaucratique, aux divergences politiques et à l’enchevêtrement des intérêts régionaux et internationaux. Il convient également d’inscrire cet événement dans un contexte géopolitique plus large, marqué par une intensification de la compétition internationale sur le continent africain. Dans ce cadre, le sommet espagnol apparaît comme une étape stratégique pour cerner les ambitions de Madrid dans cette dynamique mondiale d’influence, d’accès aux ressources et de conquête de marchés africains.
Premièrement : le contexte historique des sommets hispano-africains, de la Maison de l’Afrique au Sommet de Madrid 2025
Depuis la fin du XXe siècle et le début du XXIe siècle, l’Espagne a progressivement intensifié ses efforts pour affirmer sa présence en Afrique, percevant le continent comme un levier stratégique en raison de sa dynamique démographique, de l’abondance de ses ressources naturelles et de son potentiel économique croissant.
Dans cette optique, Madrid a misé sur la diplomatie des sommets et des conférences comme instruments de renforcement de la coopération avec les pays africains. En 2006, le gouvernement espagnol a lancé son premier Plan Afrique, une stratégie globale de partenariat, révisée en 2009 puis en 2019. Ces plans ont marqué un tournant majeur en ancrant la coopération économique, politique et culturelle au cœur des relations hispano-africaines.
Entre 2006 et 2008, l’Espagne a lancé l’initiative « Casa África », implantée aux îles Canaries, avec pour objectif de constituer un réseau d’organismes économiques et d’institutions de diplomatie publique visant à consolider sa présence en Afrique. La première conférence de l’organisation s’est tenue en juin 2007, en présence de dirigeants africains, et a abouti à un engagement en faveur du renforcement des relations diplomatiques, économiques et surtout culturelles.
En 2018, « Casa África » a organisé un forum économique international dédié à l’Afrique de l’Ouest, rassemblant ministres et entrepreneurs pour explorer les opportunités d’investissement dans l’espace CEDEAO, mettant en avant le rôle stratégique des Canaries comme passerelle entre l’Europe et le continent africain.
Parmi les événements majeurs ayant renforcé l’orientation stratégique de l’Espagne vers l’Afrique figure le « XIXe Forum économique international sur l’Afrique », tenu en 2019 à Madrid. Organisé en partenariat entre Casa África, Casa Árabe et le ministère espagnol des Affaires étrangères, de l’Union européenne et de la Coopération, ce forum a réuni décideurs politiques, investisseurs et chercheurs pour débattre des perspectives de développement du continent.
Parallèlement, des institutions telles que l’ICEX et la Chambre de commerce espagnole ont multiplié les initiatives en organisant des forums économiques avec divers pays africains, afin de promouvoir l’implantation des entreprises espagnoles dans les secteurs des infrastructures, de l’énergie et de la technologie. Dans cette dynamique ascendante, le « Sommet Espagne-Afrique » a vu le jour en 2023 sous l’impulsion des « Forums Afrique Unie », en collaboration avec le ministère des Affaires étrangères.
En 2024, la Confédération espagnole des organisations patronales (CEOE) et le Forum ibéro-africain des affaires ont organisé le deuxième sommet aux îles Canaries, avec la participation de délégations venues d’Afrique et d’Amérique latine. Cet événement a marqué une avancée significative vers l’établissement d’un modèle de coopération triangulaire.
Le sommet de Madrid, troisième du genre, s’inscrit dans cette dynamique. Il intervient après l’adoption, en décembre 2024, du « Plan d’action Espagne-Afrique 2025-2028 », articulé autour de cinq axes stratégiques et déclinés en 100 actions concrètes. Ainsi, les sommets hispano-africains ont connu une évolution notable : d’un simple plan global lancé en 2006, à la création d’un instrument culturel comme la « Casa África », pour culminer dans l’organisation de forums stratégiques et économiques de haut niveau, visant à asseoir un partenariat équilibré, pérenne et mutuellement bénéfique avec l’Afrique à l’horizon 2028.
Deuxièmement : les contextes favorables : l’Espagne, un partenaire stratégique
Derrière ce rapprochement hispano-africain se cache un ensemble de motivations et de contextes favorables qui ont poussé Madrid à élaborer des stratégies et des plans d’action à moyen et long terme, dont les plus importants sont les suivants :
- Les changements géopolitiques : L’Afrique connaît une reconfiguration des alliances internationales, en particulier dans la région du Sahel. Alors que des pays comme le Maroc renforcent leurs relations avec l’Espagne, d’autres comme le Mali, le Burkina Faso et le Niger s’éloignent de leurs partenaires occidentaux traditionnels comme la France, créant ainsi un vide et de nouvelles opportunités pour des pays comme l’Espagne. De plus, la guerre russo-ukrainienne et la pénurie de gaz qui en a résulté en Europe ont poussé l’Espagne à rechercher des alternatives énergétiques dans le nord et l’ouest du continent africain. Elle a donc renforcé ses relations avec le Nigeria et signé des contrats d’approvisionnement en gaz avec l’Algérie afin de sécuriser ses besoins.
- Les liens historiques et culturels : Madrid cherche à tirer parti de ses liens historiques et culturels, en particulier avec l’Afrique du Nord, l’Afrique centrale et l’Afrique de l’Ouest, pour renforcer son influence. La présence d’une importante communauté africaine en Espagne, estimée à environ deux millions de personnes, constitue un pont humain et culturel qui facilite le dialogue et renforce la communication entre les deux parties.
- Opportunités économiques : la zone de libre-échange continentale africaine (AfCFTA) représente un marché énorme de plus de 1,3 milliard d’habitants, ce qui ouvre de vastes perspectives pour le commerce et l’industrie. Dans ce contexte, l’Espagne cherche à permettre à ses entreprises de s’intégrer dans ce marché prometteur, soutenue par des initiatives telles que l’« Alliance pour une Afrique avancée » visant à promouvoir l’investissement. Cette orientation renforce également la position stratégique de l’Espagne en tant que porte d’entrée principale de l’Union européenne vers l’Afrique, grâce à sa proximité géographique.
- Les défis climatiques et sécuritaires : le continent africain est confronté à des défis considérables, tels que les effets graves du changement climatique qui menacent sa sécurité alimentaire, ainsi que les menaces sécuritaires telles que le terrorisme et les conflits armés, en particulier dans les régions du Sahel et de la Corne de l’Afrique. Ces défis incitent l’Espagne à se présenter comme un partenaire stratégique dans les domaines de la sécurité et du développement durable. Madrid tire parti de la tendance mondiale vers une économie verte et, en tant que membre de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), propose des programmes visant à soutenir la transition écologique dans les pays d’Afrique subsaharienne.
Troisièmement : Les objectifs du sommet : quelles nouveautés ?
Dans ce contexte, les objectifs du sommet hispano-africain sont définis par la vision de Madrid quant à son rôle futur sur le continent et sa volonté de servir les intérêts communs dans un contexte de concurrence internationale croissante. Ces objectifs consistent à renforcer sa présence en tant qu’acteur majeur dans les secteurs stratégiques, à coopérer sur des dossiers communs tels que l’immigration clandestine, à sécuriser l’approvisionnement énergétique et à faciliter l’accès de ses entreprises aux marchés africains.
Les objectifs du sommet peuvent être détaillés comme suit :
1- Coopération politique:
Le sommet a reflété un engagement en faveur d’un dialogue de haut niveau à travers l’organisation de tables rondes avec des ministres et des hauts responsables de pays tels que le Maroc, la Somalie, la Guinée-Bissau et le Sénégal. Dans ce cadre, le sommet s’est concentré sur plusieurs axes :
- Renforcement de la coopération bilatérale directe avec les pays africains : mise en avant de la nouvelle orientation espagnole vers l’élargissement de la présence diplomatique et coopérative, qui comprend le lancement de l’« Alliance Afrique vers l’avant » (Africa Forward Alliance) pour promouvoir l’investissement et augmenter les bourses d’études et les possibilités de formation professionnelle pour les jeunes Africains.
- Promouvoir la stratégie espagnole et la relier aux groupements régionaux : tels que la zone de libre-échange continentale (AfCFTA), et coordonner les efforts pour relever les défis transfrontaliers tels que le changement climatique, l’immigration et le terrorisme. Outre le soutien à la coopération multilatérale entre les unions africaine et européenne pour renforcer le partenariat continental, impliquer l’Union européenne dans la réglementation, dans le but de renforcer la coopération dans les domaines politique et juridique, et de consolider les relations institutionnelles avec les pays africains [5] .
2- Coopération économique :
Sur le plan économique, le volume des échanges commerciaux entre l’Espagne et l’Afrique reste limité ; les exportation s africaines vers l’Espagne ne dépassent pas 6 %, tandis que la part des marchés africains dans les exportations espagnoles s’élève à 7 %, des chiffres modestes par rapport à d’autres puissances internationales et régionales. C’est pourquoi le sommet s’est concentré sur le renforcement de la coopération économique dans des secteurs vitaux tels que les infrastructures, les énergies renouvelables et la pêche maritime. Les principales orientations économiques proposées par le sommet sont les suivantes :
- Activer le rôle du secteur privé : pour qu’il soit un moteur essentiel de la mise en œuvre de la vision espagnole en Afrique, en l’encourageant à s’engager dans des projets stratégiques à long terme, en particulier dans le secteur de l’énergie dans des pays comme la Somalie et le Nigeria. En outre, ouvrir la porte au forum des affaires de la Chambre de commerce espagnole afin de stimuler davantage le secteur privé à pénétrer les marchés somaliens et africains, en encourageant les entreprises espagnoles à investir dans les secteurs stratégiques, sur la base des 59 contrats accordés par la Banque africaine de développement aux entreprises espagnoles.
- Soutien aux projets d’infrastructure : par le biais des programmes de l’Agence espagnole de coopération internationale pour le développement (AECID) ; Elle a lancé des plans nationaux dans le domaine des infrastructures, tels que le plan pour la Somalie (2025-2029) pour les secteurs des infrastructures, de l’eau et de l’énergie, et le renforcement des liens économiques et sociaux en tirant parti de l’expérience espagnole dans les domaines des infrastructures, des énergies renouvelables et du commerce.
- Renforcement des investissements et soutien à l’intégration économique : l’Espagne a annoncé sa volonté d’accorder les prêts financiers dont les pays africains ont besoin. Dans ce contexte, l’Espagne pourrait jouer un rôle de médiateur pour améliorer la balance commerciale entre le continent (représenté par la zone de libre-échange continentale) et le reste du monde, en soutenant les organismes régionaux tels que la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), dans le but de promouvoir davantage les opportunités d’investissement sur le continent [8].
3- Tirer parti de la transition démographique en Afrique :
Lors du sommet, l’Espagne a exprimé son ambition de capitaliser sur la dynamique démographique africaine, avec une population attendue de plus de 2 milliards d’habitants à l’horizon 2050, ce qui pourrait multiplier par six la contribution du continent au PIB mondial. Dans cette perspective, elle a mis en avant son engagement à soutenir la jeunesse africaine à travers des initiatives structurées, notamment :
Autonomisation des jeunes Africains par l’éducation et l’entrepreneuriat : par la mise en œuvre d’une stratégie intégrée axée sur la promotion de l’éducation et de l’esprit d’entreprise, reposant sur l’attribution de bourses, la mise en place de formations qualifiantes, ainsi que le renforcement de la coopération technique et économique, afin de doter les jeunes Africains des compétences nécessaires à la transformation de leur continent.
Le sommet a donc orienté ses efforts vers la promotion de l’entrepreneuriat chez les jeunes comme moyen de créer des emplois durables. L’initiative AFRICO, un nouveau réseau de chambres de commerce visant à renforcer les partenariats commerciaux et de formation dans le domaine de l’entrepreneuriat, a ainsi été annoncée.
-Soutenir le développement économique et la migration organisée : l’Espagne a réaffirmé son engagement en faveur d’une approche « positive et organisée de l’immigration » fondée sur les droits de l’homme et la mise en place de voies légales. Cet engagement se traduit par son soutien à l’autonomisation économique des jeunes Africains grâce au financement de projets émergents, à l’élargissement des programmes de formation professionnelle, à la poursuite du financement des petites et moyennes entreprises et à la participation au développement d’infrastructures vertes.
Troisièmement : scénarios futurs pour les résultats du sommet : partenariat stratégique ou accord temporaire ?
La stratégie de l’Espagne envers l’Afrique (2025-2028) pourrait adopter l’un des scénarios suivants :
1- Mise en œuvre progressive du plan stratégique (2025-2028) :
Le sommet a révélé la volonté de l’Espagne de s’étendre et de se développer en Afrique, où les relations semblent évoluer vers une mise en œuvre progressive de la stratégie (Espagne-Afrique 2025-2028). Cette stratégie devrait donc soutenir les projets espagnols dans le domaine des infrastructures et des programmes d’enseignement technique, en plus de renforcer les outils de coopération avec l’Afrique, notamment l’Agence espagnole de coopération internationale pour le développement (AECID) qui se chargera du financement et de la coordination de ces projets.
L’Espagne s’efforcera également de renforcer les partenariats bilatéraux afin de mettre en œuvre des plans de développement inspirés du nouveau cadre de coopération, tels que le « Plan somalien pour les infrastructures 2025-2029 », qui constitue un modèle de traduction de la vision stratégique en projets concrets.
2- Consolider le rôle de l’Espagne en tant que pont commercial entre l’Afrique et l’Union européenne :
Cette orientation se traduit par l’annonce faite par l’Espagne de sa capacité à jouer le rôle de médiateur et de facilitateur dans les accords entre l’Afrique et l’Union européenne, par ses appels à élargir l’utilisation de la monnaie unique européenne (l’euro) dans les transactions africaines, ainsi que par la signature de nouveaux accords facilitant les opérations de dédouanement et renforçant les liens commerciaux. En outre, l’Espagne pourrait promouvoir des projets tripartites (entre elle, les pays africains et l’Union européenne). Ces initiatives confirment l’engagement de l’Espagne à adopter une approche participative et inclusive pour relever les défis du développement en Afrique et à rechercher des avantages mutuels pour tous les partenaires.
Ce scénario est renforcé par la volonté de l’Espagne de tirer parti de la zone de libre-échange continentale africaine et de son réseau diplomatique pour promouvoir le commerce et l’investissement. Si l’initiative « Alliance pour une Afrique avancée » suscite un intérêt international important, cela renforcera le rôle de l’Espagne en tant que pont entre l’Europe et l’Afrique. D’ici 2028, le volume des échanges bilatéraux pourrait doubler et l’Espagne pourrait devenir l’un des principaux investisseurs européens dans les secteurs des énergies renouvelables et des infrastructures sur le continent.
3- Prioriser le développement de la jeunesse africaine pour freiner l’immigration irrégulière:
Face aux enjeux liés à l’immigration clandestine, l’Espagne envisage de renforcer les initiatives centrées sur l’investissement dans la jeunesse africaine et le renforcement de ses compétences, dans une optique de prévention. Cette orientation se traduit notamment par des projets comme « AFRICO », qui bénéficie d’un appui institutionnel croissant.
Dans ce cadre, la création d’une structure permanente de coordination des relations hispano-africaines est envisagée. Cette entité aura pour mission d’assurer le suivi des projets conjoints, de formuler des politiques à long terme et de veiller à la pérennité du partenariat, tout en amplifiant ses impacts économiques et sociaux.
Quatrièmement : les défis qui se dressent sur la voie du partenariat :
Une série de défis pourraient entraver le succès du sommet hispano-africain de 2025, notamment les suivants :
- La concurrence internationale en Afrique : L’Espagne est confrontée à une concurrence féroce de la part de grandes puissances internationales, telles que la Russie, la France, les États-Unis et la Chine, qui ont des intérêts stratégiques bien établis sur le continent. Le succès de la politique espagnole en Afrique dépend donc de sa capacité à établir des partenariats stratégiques solides, à l’instar du modèle chinois.
- Tensions sécuritaires et géopolitiques : Les enjeux liés à la sécurité et à l’immigration clandestine représentent des défis pressants, notamment dans la région du Sahel, marquée par une instabilité persistante et une prolifération des groupes terroristes. En tant que pays européen particulièrement exposé à ces dynamiques, l’Espagne pourrait être contrainte de lancer des projets sociaux ciblant les causes structurelles de l’immigration, même si ces initiatives n’offrent pas nécessairement un retour sur investissement immédiat. Par ailleurs, l’expansion du terrorisme au Sahel, au Sahara et dans la Corne de l’Afrique constitue un frein considérable aux investissements espagnols, comme l’ont signalé des entreprises telles qu’Elecnor. Présente dans 14 pays africains, cette société identifie clairement ces risques sécuritaires comme des obstacles majeurs à la pérennité de ses activités sur le continent.
De même, les menaces terroristes croissantes dans la région du Sahel et de la Corne de l’Afrique pourraient pousser la stratégie espagnole à se concentrer sur la coopération en matière de sécurité, ce qui pourrait se faire au détriment des objectifs économiques et sociaux et entraîner des tensions dans les relations avec les partenaires africains qui recherchent des partenariats plus équilibrés. - Crise financière et dette : L’Espagne ambitionne de mettre en avant des mécanismes de financement innovants, notamment par la réaffectation des droits de tirage spéciaux (DTS) au profit du Fonds pour la résilience et la durabilité du FMI. Toutefois, la montée des niveaux d’endettement dans plusieurs pays africains risque de conduire à des demandes de financement supérieures aux capacités de prêt de l’Espagne. Cette situation pourrait fragiliser sa stabilité budgétaire et restreindre sa marge de manœuvre en matière d’investissement sur le continent.
Dans l’ensemble, le sommet Espagne-Afrique 2025 s’inscrit dans une dynamique de long terme, marquant une évolution significative des relations entre les deux parties. Il a permis de poser les jalons d’un partenariat global et structuré, reposant sur une vision stratégique ambitieuse centrée sur l’autonomisation économique, l’intégration régionale et la durabilité.
En renforçant sa présence diplomatique, en multipliant les initiatives conjointes avec les institutions africaines, et en intensifiant la coopération dans des secteurs clés comme l’énergie, l’éducation et les infrastructures, l’Espagne affirme sa volonté de jouer un rôle central dans le processus de transformation du continent africain. Elle cherche ainsi à bâtir un nouveau modèle de coopération Sud-Nord, fondé sur le respect mutuel et la convergence des intérêts.
La réussite de cette transition repose principalement sur deux éléments clés. D’une part, la capacité de l’Espagne à concrétiser ses engagements à travers des projets tangibles, appuyés par des mécanismes robustes de mise en œuvre et de suivi.
D’autre part, sa faculté à surmonter les réticences liées aux perceptions négatives des agendas occidentaux, en établissant des partenariats sincères fondés sur la confiance. Si ces conditions sont réunies dans un cadre de transparence et de continuité, ce sommet pourrait effectivement constituer un tournant décisif vers un nouveau modèle de coopération euro-africaine, avec Madrid en chef de file.