Après 20 ans de sa création, l’Union Africaine (UA) ne semble pas prendre en main le destin du continent. L’Afrique demeure confrontée à des défis majeurs pour pouvoir s’imposer sur la scène internationale. Le chemin est long et semé d’embûches. Mais la mission n’est pas impossible. Le constat aujourd’hui est que les démarches entreprises jusque-là ne sont pas à la hauteur des objectifs tracés sur le moyen et le long terme.
Beaucoup d’échecs enregistrés notamment en matière de stabilité et de gouvernance. Les solutions aux crises africaines – jamais définitives, du reste – viennent souvent des puissances étrangères. Aussi une bonne partie des financements de l’institution panafricaine. Outre le développement économique qui tarde à être amorcé, les Etats africains ont une infinité de problèmes sur la table : l’éducation, la santé, la sécurité alimentaire…, problèmes qui ont été d’ailleurs abordés lors du dernier sommet de l’Union.
Le continent africain est, aujourd’hui, synonyme de pauvreté, de misère, de frustration… Aussi d’instabilité, de coups d’Etat, de terrorisme… Une situation qui ne semble promettre aucune amélioration, vu les difficultés auxquelles il est difficile, voire impossible, à un État de faire face isolément. Quels sont, de ce fait, les défis et les perspectives de l’UA après deux décennies de sa création ?
Dans cet article, il s’agira dans un premier temps de faire un bref historique de l’Union africaine ainsi que les étapes les plus importantes de son existence. Dans un deuxième temps, il sera question des obstacles qui freinent le développement en Afrique et paralysent ses appareils politiques. Enfin, dans un troisième et dernier temps, il sera question d’un ensemble des recommandations à même de permettre à l’Union africaine de concrétiser ce à quoi le continent aspire.
L’Union africaine ou le rêve des «Etats-Unis d’Afrique»
C’est vers la fin des années 50 que les leaders africains commencent à réfléchir sérieusement à l’union et à l’alliance. La première tentation remonte à 1957, et avait pour nom « Les Etats-Unis d’Afrique ». Nous la devons au centrafricain Barthélemy Boganda qui voulait une Afrique à l’image des Etats-Unis d’Amérique.
Ce projet ambitieux, initié par l’écrivain jamaïcain Marcus Garvey il y a déjà un siècle, n’a pas vu le jour faute de consensus. Néanmoins, l’idée n’est pas morte.
Quelques années plus tard, plus exactement le 25 mai 1963, l’Organisation de l’unité africaine (OUA) est née à Addis-Abeba, en Ethiopie, devenue plus tard la capitale politique et diplomatique de l’Afrique. L’OUA a été créée et présidée principalement par l’empereur éthiopien Haîlé Sélassié 1er.
Après quatre décennies d’existence, les dirigeants africains, à leur tête Maammer Kaddafi, ont voulu donner un nouvel élan à l’alliance africaine. En effet, l’Union africaine (UA) sera officiellement substituée à l’OUA, le 09 juillet 2002, à Durban en Afrique du Sud, et ce en application de la déclaration de Sytre 1999. Un an plus tard, lors du Sommet de Maputo, au Mozambique, l’Union se dotera d’institutions (Commission, Parlement panafricain et Conseil de la paix et de sécurité).
En 2009, Kaddafi, alors président de l’UA, eut un projet très ambitieux pour le continent. Il était allé jusqu’à envisager une force militaire africaine unie, une monnaie africaine unique, ainsi qu’un passeport africain permettant la libre circulation. Néanmoins, ce projet n’a pas été accueilli à bras ouverts par les chefs d’Etats africains. Certains estimeront même que cette idée était à l’origine de son assassinat deux ans plus tard.
L’écart entre les aspirations et les moyens mis en œuvre
Aujourd’hui, après quatre décennies d’existence, les dirigeants africains, à leur tête Maammer Kaddafi, ont voulu donner un nouvel élan à l’alliance africaine.
Il est vrai que l’institution panafricaine est au commencement et que la démocratie et la prospérité économique et sociale du continent ne sont pas pour demain. Nombreux, en effet, sont les défis à relever, à commencer par la question sécuritaire qui constitue un frein majeur ajournant le développement dans le continent. En 2016, à Lusaka (Zambie), les chefs des Etats africains misaient sur la fin des luttes et conflits armés en Afrique vers 2020.
Mais cette prévision ne se réalisera pas. Pis encore, l’année dernière (2021), les putschistes de tous bords ont battu tous les records : quatre coups d’Etats en seulement 12 mois ! Faut-il aussi souligner qu’une grande partie des décisions et des actions du NATO ont eu pour objet le continent africain.
Il est difficile d’aborder les défis de l’Afrique sans évoquer la question de la gouvernance. C’est un vrai challenge, et pour la classe politique, et pour les populations. La fragilité des institutions politiques et la problématique de la souveraineté des Etats n’est plus à prouver. Rajoutez-y le déficit en légitimité des gouvernants et le sentiment de ne pas être représenté où sont plongées les populations, d’où, d’ailleurs, l’émergence des groupes et organisations terroristes.
En matière de politiques économiques, l’Afrique n’a pas fait des pas de géant. Dans certains pays, on parle même de recul chronique. En dépit du « décollage économique » au début du millénaire, le continent est l’un des territoires les plus faibles au monde en termes d’échanges économiques et de circulation de marchandises. Moins de 16% du commerce des pays africains s’effectue sur le continent-même.
En effet, tout n’est pas si mauvais, après la création de la zone de libre échange continentale en janvier 2021, ce chiffre pourrait augmenter pour atteindre 60%, selon les prévisions. La Zlecaf se donne 15 ans pour supprimer l’essentiel des taxes douanières au sein du continent.
L’Afrique est également confrontée à un autre souci, et pas des moindres : le boom démographique. D’ici 2100, la population africaine représentera 40% de la population mondiale, selon les prévisions. C’est le Niger qui enregistre le taux de natalité le plus élevé au monde : on parle de huit (8) enfants par femme.
Enorme quand on y est pense ! L’autre souci est l’échec scolaire. Un sérieux problème d’éducation et de formation se pose aujourd’hui en Afrique. Les systèmes éducatifs n’ont pas réussi à pourvoir les pays africains en compétences à même de relever le défi du développement.Beaucoup d’enfants quittent l’école très tôt. Au Mali, en guise d’exemple, un enfant sur trois termine le cycle primaire. Au sud du Sahara, le taux d’analphabétisme est très alarmant. Seulement 20% de la population ont un diplôme de secondaire.
L’Afrique aux africains, un objectif majeur
Quant aux perspectives d’avenir, elles sont sombres et incertaines à la lumière de ce qui précède. Cela n’empêche pas, loin s’en faut, que le projet africain reste très ambitieux.
L’UA envisage de continuer à œuvrer pour la paix et la stabilité politique et institutionnelle et à promouvoir les pratiques démocratiques. Dans ce sens, les coups d’Etats répétitifs sont dénoncés et condamnés. Les membres de l’UA se sont donné un mot d’ordre : tolérance zéro avec les changements anticonstitutionnels.
Pour les institutions militaires, les challenges ne manquent pas. Les armées des pays africains ont intérêt à se démocratiser. Mais avant cela, elles ont besoin de se doter des moyens à même de mettre hors d’état de nuire les groupes terroristes et les aventuriers de tout poil.
En économie, les pays africains ont un besoin impérieux, sinon d’abolir les frontières, du moins de procéder à l’allègement des barrières douanières. En d’autres termes, un marché africain pour les Africains est aujourd’hui plus qu’une nécessité. Les partenariats avec les pays qui semblent avoir compris les besoins du continent, à l’instar de la Chine, ne sont, bien évidemment, pas à dédaigner.
Les économies des pays émergents doivent, entre autres, servir de modèle pour les pays africains, sans pour autant céder leurs richesses aux grandes puissances. En fait, l’un des défis majeurs est de rendre l’Afrique aux africains.
Quant aux défis de l’Union africaine en tant qu’institution, certains politologues estiment que cet appareil a besoin de réformes.
De même, elle doit servir de modèle pour les gouvernements en matière de démocratie et de transition constitutionnelle. L’UA a besoin également de s’autofinancer pour ne plus dépendre des puissances étrangères.
Les Etats africains ont l’obligation de financer l’UA, actuellement sous-financée. Le nationalisme excessif de certains Etats va en opposition aux objectifs de la force continentale. L’Afrique est condamnée à parler d’une seule voix. Tôt ou tard.
L’UA avance, c’est vrai, à petits pas. Elle stagne parfois. Mais elle est là comme une institution qui représente tous les Africains. Son objectif ultime est de fonder «une Afrique intégrée, prospère et pacifique, dirigée par ses propres citoyens et représentant une force dynamique sur la scène mondiale».
Le projet Kaddafi (une seule monnaie, une seule armée et un passeport africain) a peut-être de belles années devant lui. Pourvu que la volonté politique soit au rendez-vous. Dans le cas contraire, les Africains se retrouveront spectateurs de la ruine de leur continent.