La Cour pénale internationale (CPI) a condamné un ancien chef de milice soudanais pour des atrocités commises lors du conflit du Darfour il y a plus de 20 ans. Il s’agit de la toute première condamnation liée aux violences qui ont ravagé la région.
Lundi, les juges de La Haye ont déclaré Ali Muhammad Ali Abd-Al-Rahman, alias Ali Kushayb, coupable de 27 chefs d’accusation de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, dont meurtre, viol, torture et persécution. Sa peine sera déterminée à l’issue d’une nouvelle série d’audiences.
Ce jugement marque une étape historique pour la CPI, car il s’agit de la première et unique condamnation découlant du conflit du Darfour depuis que le Conseil de sécurité des Nations Unies a saisi la Cour en 2005.
Abd-Al-Rahman, qui a nié les 31 chefs d’accusation lors de l’ouverture de son procès en avril 2022, était accusé d’avoir dirigé les milices Janjawid, responsables de certaines des pires atrocités commises au Darfour entre 2003 et 2004. Les procureurs ont qualifié ses actes d’actes de « violence bestiale », notamment des attaques coordonnées contre des villages, des massacres et le recours au viol comme arme de guerre.
Au cours du procès, 56 témoins ont témoigné, relatant des scènes poignantes de communautés entières anéanties, de femmes agressées et de villages incendiés. Selon un témoignage, Abd-Al-Rahman aurait ordonné aux combattants d’attaquer à nouveau, en disant : « Répétez, répétez pour ces personnes. Il y en a peut-être qui vous ont échappé. »
Le conflit du Darfour a éclaté en 2003 lorsque des rebelles issus de communautés non arabes ont pris les armes contre le gouvernement de Khartoum, dominé par les Arabes, l’accusant de marginalisation. Le régime du président de l’époque, Omar el-Béchir, a réagi par une brutale campagne de contre-insurrection, menée en grande partie par les milices Janjawid. Cette politique de la terre brûlée a fait environ 300 000 morts et contraint 2,7 millions de personnes à quitter leur foyer.
El-Béchir lui-même est accusé par la CPI, notamment de génocide, mais il est toujours en liberté.
Ce verdict intervient alors que de nouveaux rapports d’atrocités et de famine continuent d’émerger au Darfour, où les combats se sont à nouveau intensifiés ces dernières années. En juillet, le procureur adjoint de la CPI a déclaré aux Nations Unies que des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité étaient toujours commis dans l’ouest du Soudan.
Pour de nombreuses victimes et survivants, le jugement de lundi offre un rare moment de justice et rappelle le long chemin qui reste à parcourir pour que les responsables rendent des comptes au Soudan.




