La 12e édition de l’Africa CEO Forum s’est tenue les 12 et 13 mai 2025 à Abidjan. Elle a réuni plus de 2 800 dirigeants, dont six chefs d’État africains, pour débattre de la trajectoire de développement du continent. Les principaux débats ont porté sur les stratégies énergétiques, les avancées technologiques et le développement des infrastructures.
L’énergie nucléaire : un pilier stratégique pour le développement de l’Afrique
Lors de l’Africa CEO Forum 2025, l’énergie nucléaire est apparue comme un point central des discussions sur l’avenir énergétique de l’Afrique. Loyiso Tyabashe, PDG de la Nuclear Energy Corporation (Necsa) d’Afrique du Sud, a souligné la nécessité d’intégrer l’énergie nucléaire aux sources renouvelables pour garantir un approvisionnement énergétique stable et abordable.
« Le nucléaire fournit une énergie de base essentielle à l’industrialisation », a déclaré M. Tyabashe. Il a souligné la rentabilité de l’énergie nucléaire, citant l’expérience de l’Afrique du Sud avec ses deux réacteurs nucléaires du Cap, parmi les sources d’électricité les moins chères. Il a également insisté sur la responsabilité environnementale du nucléaire dans la réduction des émissions de carbone.
Répondant aux préoccupations concernant les déchets radioactifs, Tyabashe a assuré que Necsa tenait des registres complets de tous les déchets depuis la mise en service de son réacteur de recherche en 1965 et de son réacteur de puissance en 1984. « Nous pouvons comptabiliser tous les déchets que nous avons produits », a-t-il affirmé.
Le potentiel des petits réacteurs modulaires (PRM) a également été évoqué. Tyabashe a souligné que les PRM promettent un déploiement plus rapide et des coûts d’investissement réduits, ce qui les rend adaptés aux pays dotés de réseaux électriques de petite taille. « Il n’existe pas de solution universelle ; nous devons adapter la technologie de production à la stabilité du réseau de chaque pays », a-t-il expliqué.
À l’avenir, Necsa prévoit de développer du combustible nucléaire à partir d’uranium brut, en exploitant les ressources en uranium de l’Afrique du Sud et du continent. Par ailleurs, l’entreprise vise à construire des SMR et à explorer de multiples applications des réacteurs de recherche, notamment la production d’électricité et d’isotopes à usage médical.
Les discussions du forum ont reflété un consensus croissant sur le rôle de l’énergie nucléaire dans le développement durable de l’Afrique. Un sondage réalisé lors de l’événement a indiqué que 73 % des participants considéraient le nucléaire comme une solution énergétique viable pour le continent.
Intelligence artificielle : façonner le cadre réglementaire de l’Afrique
Alors que l’intelligence artificielle (IA) transforme les économies mondiales, l’Afrique cherche à établir ses propres voies réglementaires. Lors du forum, les experts ont débattu de modèles adaptés au continent, conciliant innovation, souveraineté et réalités locales.
Franck Kié, fondateur du Cyber Africa Forum, a souligné les progrès réalisés : « Plusieurs pays, dont le Bénin et le Rwanda, ont adopté des stratégies nationales en matière d’IA. L’Union africaine a également lancé une approche continentale en 2024. »
Catherine Muraga, du Centre de développement Microsoft pour l’Afrique, a mis l’accent sur l’inclusion : « Nous développons des outils en kiswahili, amharique, yoruba… afin de garantir que personne ne soit exclu. L’Afrique compte près de 2 000 langues.» Elle a insisté sur le fait qu’une IA responsable implique l’intégration de la sécurité et de la confidentialité dès la phase de conception.
Le consensus a souligné l’urgence pour l’Afrique d’accélérer sa gouvernance et ses investissements dans l’IA afin d’éviter toute dépendance aux décisions technologiques étrangères.
Infrastructures : l’épine dorsale de l’industrialisation de l’Afrique
Le développement des infrastructures reste essentiel à la croissance industrielle de l’Afrique. Lors du forum, les discussions ont porté sur l’amélioration de la logistique, de l’accès à l’énergie et de la connectivité afin de transformer les chaînes de valeur.
Mohammed Diop, directeur général adjoint Afrique d’AGL, a souligné les défis : « En Afrique, jusqu’à 30 à 40 % des produits sont perdus à la ferme. Nous travaillons sur des projets au Sénégal et dans d’autres pays pour établir des entrepôts spécialisés à proximité des exploitations agricoles afin de réduire les pertes agricoles.»
Les initiatives du secteur privé, comme l’investissement annuel de 600 millions d’euros d’AGL en Afrique, témoignent de l’engagement d’AGL en faveur de l’amélioration des infrastructures. Cependant, l’énergie demeure un obstacle majeur. Pour y remédier, Schneider Electric a signé des accords stratégiques avec 3MD Energy et SmartEnergy afin de développer des solutions d’électrification industrielle locale, intégrant production locale et digitalisation.
Ces partenariats visent à garantir l’accès à l’énergie et à créer des emplois, conformément aux objectifs de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) visant à stimuler le commerce intra-africain. Pour une industrialisation durable, les États doivent simplifier la réglementation, attirer les financements et connecter les zones reculées, afin que l’Afrique puisse pleinement exploiter ses ressources.