Le président nigérien Mohamed Bazoum, renversé lors d’un coup d’État le 26 juillet, entame vendredi son 80e jour de détention avec sa femme et son fils. Il refuse toujours de démissionner et espère obtenir gain de cause devant le tribunal.
Alors que de nombreux pays et organisations continuent de réclamer sa libération, le régime militaire au pouvoir reste pour l’instant inflexible.
Près de trois mois de détention
Depuis le coup d’Etat du 26 juillet, Mohamed Bazoum est retenu prisonnier dans sa résidence du palais présidentiel, en compagnie de son épouse Haziza et de son fils Salem.
« Sa situation n’a pas changé », affirme son avocat sénégalais Mohamed Seydou Diagne.
Selon des membres de son entourage interrogés par l’AFP, il est toujours « séquestré, sans électricité », et avec un accès intermittent à l’eau.
« Il reçoit des vivres frais un jour sur deux et des visites régulières de son médecin », précise l’une de ces sources, qui ajoute qu’il se porte bien, tout comme sa femme et son fils.
« Il est toujours aussi fort. Il ne va pas démissionner », insiste une autre source proche de lui.
Début août, Mohamed Bazoum se qualifiait d’« otage » dans un article du Washington Post, et qualifiait le traitement infligé à sa famille d’« inhumain et cruel » auprès de l’ONG Human Rights Watch.
Saisine des tribunaux
Le 18 septembre, Mohamed Bazoum a décidé de saisir la justice ouest-africaine pour exiger sa libération et le rétablissement de l’ordre constitutionnel au Niger.
« Lorsque vous déposez une requête, la partie adverse dispose d’un mois pour répondre. A l’issue de ce délai, la Cour de justice de la Cedeao fixe une date d’audience », a expliqué Me Diagne à l’AFP.
« Il existe une requête principale accompagnée d’une requête accélérée afin que la Cour puisse fixer une audience dans quelques semaines », a-t-il poursuivi.
Un groupe d’avocats mandatés par l’une des filles de Mohamed Bazoum avait annoncé début octobre son intention de porter plainte contre le régime militaire de Niamey, mais celle-ci n’a toujours pas été déposée, selon l’un des avocats.
Soutien international
Le coup d’État a été rapidement condamné par les partenaires occidentaux du Niger, comme la France et les États-Unis, ainsi que par l’ONU, qui a exprimé son soutien à Mohamed Bazoum et exigé sa libération.
Quelques jours plus tard, la CEDEAO adoptait la même position et menaçait le Niger d’une intervention armée.
Bien que cette option soit officiellement encore sur la table, elle n’a pas encore été mise en œuvre.
La France, l’un des plus fervents partisans de Mohamed Bazoum, a commencé le 9 octobre à retirer ses quelque 1 400 soldats de la campagne antijihadiste et a renvoyé fin septembre à Paris son ambassadeur à Niamey, Sylvain Itté, deux demandes formulées par le régime.
« L’enjeu reste la libération de Bazoum et le rétablissement du pouvoir civil au Niger. Il reste donc également nécessaire d’exercer une pression coordonnée avec les partenaires de la région sur les autorités de fait », affirme une source diplomatique française.
Du côté américain, le secrétaire d’État Antony Blinken s’est entretenu lundi au téléphone avec M. Bazoum pour lui réaffirmer son soutien à son retour au pouvoir, et les États-Unis ont suspendu le lendemain leur aide au Niger.
Mohamed Bazoum est le cinquième président nigérien à être renversé par un putsch depuis que le pays a obtenu son indépendance de la France en 1960.
Le premier président, Hamani Diori, renversé en 1974, a été emprisonné puis assigné à résidence pendant plusieurs années avant d’être libéré en 1987 et de quitter le pays pour le Maroc.