Le président de la Guinée-Bissau, Umaro Sissoco Embalo, a décidé lundi de dissoudre le Parlement dominé par l’opposition, trois jours après des affrontements armés qu’il qualifie de « tentative de coup d’État » et qui ont plongé ce petit pays d’Afrique occidentale dans une énième crise.
« La date des prochaines élections législatives sera fixée en temps opportun, conformément aux dispositions (…) de la Constitution », précise un décret présidentiel communiqué à la presse.
Le président Embalo invoque la « complicité » entre la Garde nationale, corps impliqué dans les affrontements avec la Garde présidentielle jeudi soir et vendredi, et « certains intérêts politiques au sein même de l’appareil d’Etat ».
« Après cette tentative de coup d’État menée par la Garde Nationale et face aux preuves solides de l’existence d’une complicité politique, le fonctionnement normal des institutions de la République est devenu impossible. Ces faits confirment l’existence d’une grave crise politique. , » il a dit.
La Guinée-Bissau connaît une instabilité politique chronique et a connu une série de coups d’État depuis son indépendance du Portugal en 1974, le dernier en février 2022.
Des éléments de la Garde nationale ont fait irruption jeudi soir dans les locaux de la police judiciaire pour en extraire le ministre de l’Économie et des Finances, Souleiman Seidi, et le secrétaire d’État au Trésor public, Antonio Monteiro qui y étaient interrogés. . Ils se sont ensuite réfugiés dans un camp militaire de la capitale Bissau et ont résisté par les armes jusqu’à vendredi matin.
Les affrontements ont fait au moins deux morts. Ils sont considérés comme une nouvelle illustration des profondes fractures politiques au sein de l’État entre la présidence et le gouvernement, qui traversent également les forces de sécurité.
La Garde nationale dépend essentiellement du ministère de l’Intérieur, et donc du gouvernement, lui-même émanation du Parlement dominé par l’opposition. Le parquet, qui a ordonné l’arrestation des deux membres du gouvernement, a répondu à la présidence.
Les élections législatives de juin 2023 ont donné la majorité absolue à une coalition formée autour de l’historique Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC), vieil adversaire du président. M. Embalo, qui dirige le pays depuis 2020, s’est retrouvé condamné à cohabiter avec le gouvernement.
Dans son décret, le président dénonce « la passivité du gouvernement » face aux événements. Il assure que le but de la Garde nationale, en cherchant à libérer les deux membres du gouvernement, était d’entraver les enquêtes menées par le parquet.
Les deux membres du gouvernement ont été placés en garde à vue jeudi et interrogés au sujet d’un retrait de dix millions de dollars des caisses de l’Etat. La question avait déjà été discutée au Parlement.
Le président Embalo accuse le Parlement d’avoir « préféré défendre les membres de l’exécutif soupçonnés d’actes de corruption portant gravement atteinte aux intérêts supérieurs de l’Etat », plutôt que « de lutter pour l’application rigoureuse de la loi (…) et d’exercer son rôle de contrôler les actions du gouvernement.
M. Embalo a prévenu samedi que les troubles auraient de « graves conséquences ».