La tension monte entre les autorités militaires nigériennes et la Côte d’Ivoire.
Les putschistes ont rappelé l’envoyé nigérien à Abidjan, lundi 14 août, après les propos tenus par le président ivoirien Alassane Ouattara.
A son retour d’un sommet de la CEDEAO le 10 août, Ouattara a déclaré que les chefs d’Etat s’étaient mis d’accord pour qu’une opération militaire « commence dès que possible ».
« Loin d’être l’expression de la volonté du peuple ivoirien frère, dont l’amitié avec le peuple nigérien est sans équivoque, cette déclaration insolite du président Ouattara et son empressement à mener contre le Niger une agression en tout point illégale et insensée, reflète en réalité un ordre qui lui est adressé ainsi qu’à certains de ses pairs de la CEDEAO par d’autres puissances extérieures, dans le but de préserver des intérêts qui ne correspondent plus à ceux du Niger d’aujourd’hui.
Ouattara a déclaré que la Côte d’Ivoire fournirait un bataillon pouvant aller jusqu’à mille cent hommes, aux côtés du Nigeria et du Bénin.
La semaine dernière, les dirigeants de la CEDEAO ont ordonné le déploiement d’une « force en attente », mais n’ont donné aucun détail sur une éventuelle intervention militaire.
Ils ont également réaffirmé qu’ils privilégieraient la voie diplomatique pour restaurer le président Bazoum.
Intervention risquée
La « force en attente » est mandatée par la CEDEAO pour des missions liées au maintien de la paix. Il a déjà été déployé en Sierra Leone, au Libéria, en Guinée-Bissau et en Gambie. Les experts doutent de la faisabilité d’une opération militaire à haut risque et difficile à mettre en œuvre.
Or, la CEDEAO « ne s’est jamais entendue sur le type de missions précises que ces forces devraient mener », explique Marc-André Boisvert, chercheur et consultant sur le Sahel affilié au Centre FrancoPaix de Montréal.
La mise en place d’une telle force « dépend de la volonté des contributeurs », ce qui « nécessite beaucoup de négociations entre les pays », dit-il. Cependant, « il y a beaucoup de méfiance entre les pays » de la CEDEAO selon lui.
Le Sénégal, le Bénin, le Nigeria et la Côte d’Ivoire ont déclaré qu’ils étaient prêts à envoyer des troupes, mais font face à des critiques internes et à l’hésitation d’autres pays d’Afrique de l’Ouest.
« Une telle opération devrait mobiliser 3 000 à 4 000 soldats », a déclaré le général sénégalais Mansour Seck. L’effectif de l’armée nigérienne est estimé à environ 30.000 hommes, dont quelque 11.000 déployés sur le théâtre d’opérations, avait indiqué le président Bazoum en 2022.
Tous les experts s’accordent sur la difficulté de mener une telle opération militaire au Niger ou dans sa capitale. Une offensive terrestre obligerait les forces ouest-africaines à parcourir plusieurs centaines de kilomètres en territoire hostile, et une opération aérienne sur le palais présidentiel où est détenu le président déchu suscite tout autant de doutes.
Dans ce dernier cas, l’aéroport de Niamey pourrait avoir une importance stratégique pour déployer des troupes aéroportées, selon des analystes.